QUEER
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Une recherche de liens portée par un formidable Daniel Craig
C’est dans une sorte voyage intérieur que tente de nous plonger le nouveau de Luca Guadagnino, réalisateur du sublime « Call me by your name » et de la relecture de « Suspiria« . « Queer« , adapté du roman de William S. Burroughs, met en scène un cinquantenaire gay vieillissant, obsédé par la beauté des jeunes hommes qu’il croise à Mexico, le sexe semblant cantonné à des jeunes hommes locaux, alors qu’une véritable connexion, autant physique qu’émotionnelle, avec un autre Américain, semble chose désormais impossible. Pourtant pour cet écrivain oisif et désabusé, l’apparition du jeune Eugene Atterton, qu’il décrit comme une version « plus jeune de lui-même », mais aussi comme « baked Alaska », c’est à dire « hot dehors et froid dedans », va tout changer et faire ressurgir la possibilité de sentiments.
Le personnage principal, William Lee, réfugié au Mexique à cause de problèmes d’addiction, est interprété avec brio par un Daniel Craig (« Mourir peut attendre« , « Quantum Of Solace« , « À couteaux tirés« ) adoptant avec ce qu’il faut de distance, et incarnant à merveille la frustration obsédée du personnage. Rajoutant un aspect légèrement fantastique avec la quête d’une mystérieuse plante, le Yage, capable de démultiplier les capacités de télépathie (dont il partira à la recherche plus au Sud, en Amérique Latine, en bonne compagnie), le scénario se concentre avant tout sur l’état psychologique d’un personnage en manque de lien, isolé entre sexe occasionnel et souvent rémunéré et désir contrarié.
Autour des deux personnages principaux, l’un fuyant, l’autre trop démonstratif et donc envahissant, c’est une relation déséquilibrée qui va s’installer, faite de dépendance et d’espoirs brisés. La mise en scène de Luca Guadagnino assume, dans un rythme nonchalant seyant bien à la chaleur ambiante, une approche clairement physique des connexions du personnage avec les aurtres hommes, utilisant les couleurs comme marqueurs de la chaleur de certaines scènes (verte dans l’entrée discrète de l’hôtel, rouge une fois dans la chambre avec le jeune mexicain, plus crue lors de la première fellation entre les deux caucasiens…). Des choix liés aussi à l’état d’influence dans lequel le personnage se trouve, en fonction des drogues utilisées (cigarette, cocaïne, venin…). Sans jamais quitter de son objectif la question des caresses, parfois repoussées, parfois réalisées « à distance », comme lien ultime de tendresse, l’auteur s’offre aussi une très belle scène aux corps nus, magnifiquement chorégraphiée, où celles-ci semblent s’interpénétrer grâce à de subtils effets spéciaux. Histoire d’amour hésitante et contrariée, « Queer » aborde le vieillissement et la persistance du désir de lien, faisant preuve d’une belle tristesse, qui nous emporte dans les turpitudes d’un personnage entre élan et nostalgie, mais aussi entre vie et mort.
Abus de Ciné