ROCK BOTTOM
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À l’occasion du cinquantième anniversaire du lancement de l’album Rock Bottom composé par le génial Robert Wyatt, membre fondateur des Soft Machine, et produit par Nick Mason des Pink Floyd, l’Espagnole María Trénor propose dans son premier long-métrage une retranscription poétique de sa gestation. Rock Bottom [+], en lice dans la section L’officielle du Festival du film d’animation d’Annecy, part de l’histoire d’amour tumultueuse du musicien anglais avec sa future femme, l’artiste Alfreda Benge (Alif dans le film), une sorte de Roméo et Juliette sous acide, aux prises avec la construction d’un nouveau monde fait d’art et de voyages au-delà du réel.
Si Rock Bottom s’articule résolument autour de l’histoire d’amour fusionnelle de Bob et Alif, la véritable héroïne du film, intrigante et poétique, est néanmoins la musique, ou plutôt les chansons qui composent l’album historique de Robert Wyatt. Celles-ci, mises en scène comme si elles constituaient la partition d’une comédie musicale, explosent littéralement grâce à la créativité sans limites que permet l’animation. Entre des personnages avec des traits anthropomorphiques, peints à l’aquarelle, et des images plus abstraites qui rendent le monde intérieur d’Alif (le travail de Marta Gil Soriano sur l’animation est tout simplement magnifique), trop souvent étouffé par un patriarcat qui n’épargne pas même la communauté hippie, le film avance comme un torrent en crue. Dans la lignée de l’expérimentation qui caractérise la musique de Wyatt (qui mélange allègrement rock progressif, jazz, improvisation et psychédélisme), l’animation cherche à rendre par des images l’essence d’une expérience artistique et humaine unique, à la fois candide et intransigeante, révolutionnaire et encore suffoquée par des diktats dont elle a du mal à de libérer.
Quoique la réalisatrice précise qu’elle s’en est inspirée sans vouloir non plus composer une biographie pure et dure, ce qu’on ne peut nier, c’est que la vie du chanteur anglais fait déjà l’effet d’un film. Forcé de reconsidérer toute sa vie après une défenestration accidentelle qui l’a rendu paraplégique, Robert Wyatt a donné le jour à l’album auquel s’intéresse le film précisément dans ce moment très délicat de transition. Au-delà de la narration à proprement parler, qui devient parfois quasi superflue, le véritable point fort du film est sa capacité à nous transporter non seulement dans l’esprit de ses personnages mais aussi au-delà, dans leurs rêves. Ce travail, scandé d’ambiances nocturnes, de trips hallucinés et de personnages qui flirtent avec le gothique (comme le producteur fou avec son chapeau en corne ou le mécène pasolinien qui vit à Majorque), transcende la pure et simple mise en scène d’une histoire d’amour pour révéler les côtés les plus sombres et intéressants des personnages, les contradictions et les secrets qui unissent deux êtres tourmentés et libres.
Le choix de l’animation, avec la liberté artistique qu’elle offre, était judicieux : il a permis à la réalisatrice de dialoguer, au vrai sens du terme, avec un album très particulier qui, encore aujourd’hui, ne laisse d’intriguer.
Cineuropa
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