STOP MAKING SENSE

De DEMME Jonathan
Réalisation : DEMME Jonathan
Avec : Bernie Worrell, Alex Weir, David Byrne

Durée : 1h 30min
Genre : Documentaire, Musical




Synopsis
Décembre 1983, Pantages Theatre à Hollywood. David Byrne, leader des Talking Heads, s'avance sur une scène vide, lance une cassette audio et entame une version envoûtante du célèbre Psycho Killer. Les membres du groupe arrivent sur scène un par un, à chaque nouvelle chanson, pour créer l'un des concerts les plus mythiques de l'histoire du rock. Filmé au cours de trois concerts des Talking Heads pour la tournée de leur album Speaking in Tongues, Stop Making Sense est le produit unique du génie créatif de David Byrne et de l'audace visuelle de Jonathan Demme (Le Silence des agneaux). Trente-cinq ans après avoir révolutionné le genre musical avec une énergie inédite, Stop Making Sense reste le film culte de l'univers du rock, une référence indépassable à découvrir pour la 1re fois restaurée.

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Le film musical est un genre diversifié et surprenant mais qui se fait assez rare aujourd’hui. On y trouve des mockumentaires (avec l’inénarrable Spinal Tap en représentant) ou le documentaire expérimental comme Godard avec les Stones dans One + One ou  Forsyth et Pollard avec leur brillant 20.000 Days on Earth sur la vie et l’oeuvre de Nick Cave sorti fin 2014 en France (foncez le voir si ce n’est pas encore fait).

La grosse part du film musical reste le concert filmé, que l’on retrouve après chaque tournée d’un groupe quasiment. Leur place dans le cinéma prête souvent à débat : sont-ils des oeuvres artistiques ou juste une représentation plate d’un événement forcément moins bon à regarder assis dans son canapé que d’y assister en personne ? Pourtant, la mise en scène dans un concert est omniprésente. Que ce soit via la mise en scène du concert en lui-même, l’agencement de la scène, des lumières, le choix des musiques ; mais aussi de par le metteur en scène, qui multiplie les points de vue de mise en scène, peut effectuer des plans divers et variés et surtout provoquer des émotions avec le montage et le mixage final. Néanmoins tous les concerts ne sont pas à mettre dans le même sac car certains se détachent de la masse : de par la volonté du groupe de présenter un concert unique – Live in Pompeii de Pink Floyd – ou parce que la personne derrière la caméra a du talent et qu’il s’allie avec une personnalité artistique forte et créative.

Stop Making Sense est de cette dernière catégorie. En 1984, Talking Heads est un groupe phare tâtant de la pop, de la funk, du punk et du post-punk. Un groupe talentueux touche-à-tout qui est porté par son chanteur David Byrne. Après la sortie de Speaking in Tongues début 1983, le groupe part en tournée en développant l’idée de concerts vivants où chaque musicien arrive au fur et à mesure du concert et où la scène évolue au fil du temps. Un cinéaste décide de les suivre pour l’occasion : Jonathan Demme n’a certes pas encore connu de succès commercial, mais ses films produits par la boîte de Roger Corman lui ont valu une bonne petite réputation critique. Il veut filmer un concert du groupe ; Byrne accepte, conscient du potentiel de la chose.

La première minute de Stop Making Sense donne le ton de ce que sera la mise en scène du film : la caméra suit Byrne arriver sur scène seul en travelling juste en filmant ses pieds. Il marche, s’arrête devant le micro, pose une enceinte et lance la cassette à l’intérieur. Ses pieds bougent en rythme puis la caméra remonte sur le visage de Byrne où le regard est déjà enflammé. Puis vient Psycho Killer en acoustique, un des plus grands tubes du groupe.

Beaucoup considèrent que Stop Making Sense est le meilleur concert jamais filmé. Difficile de leur donner tort. Demme nous montre les moments fraternels entre chaque musicien et musiciennes quand il le faut sans trop s’appesantir dessus. Si Byrne est le centre de l’attention, il capte la vitalité de chaque membre sur scène : via des plans larges ou à l’occasion de solos de guitare ou de clavier. L’ambiance se fait tour à tour intimiste, festive, crépusculaire, grâce aux lumières ou aux mouvements du groupe sur scène. Demme saisit cette vitalité comme peu réussissent à le faire. Sa caméra est précise : les plans larges sont de toutes beauté (comme sur What a day that was), les plans serrés sont millimétrés et la caméra vit toujours, s’octroyant de beaux travelling sur les mouvements du groupe.

Certes, Demme bénéficie du travail de Byrne qui a réfléchi à la scénographie des concerts de son groupe. Certes, il filme une bande à son apogée qui maîtrise parfaitement sa musique. Mais là où un faiseur se serait contenté de rendre compte du concert, Demme le rend vivant et foisonnant. Il raconte et montre la puissance d’un des groupes phares des années 80, mais pas que. Stop Making Sense peut se voir comme une ode à la démesure de Byrne mais aussi comme l’histoire de personnes qui cherchent à s’amuser avant tout. Et Demme parvient à montrer cela sans faire passer la musique au second plan, sans recourir à des interviews ou à faire appel à des artifices particuliers. Juste en montrant un groupe face à son public.

Le cinéma raconte une histoire avec des images. Ici cela ne pourrait pas être plus vrai. La playlist du groupe se déroule en racontant la communion entre un public, la créativité d’un groupe et surtout celle de son leader, le plaisir de jouer… Stop Making Sense est une ode à l’art musical d’une heure trente et un film virtuose, un des plus grands de son réalisateur. Et une occasion formidable de découvrir un immense groupe si vous ne le connaissiez pas avant.

Le Bleu du Miroir

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