Réalisation :Wes AndersonAvec :Benicio Del Toro, Mia Threapleton, Michael Cera
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Durée :1h 41minGenre :Action, Comédie, DramePays :USSynopsisL'histoire d'une famille et de son entreprise.
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“The Phoenician Scheme” : Wes Anderson renoue avec l’aventure à travers un film drôle et inventif
Le cinéaste revient avec une épopée digne de Tintin, celle d’un Benicio Del Toro en dandy riche qui renoue avec sa fille tout en essayant de sauver sa peau. Un bon cru Wes Anderson que cette fable drôle, explosive et profonde.
Les films de Wes Anderson suscitent, chez qui les aime, une impatience singulière : en les découvrant, on pense déjà au plaisir de les revoir bientôt. Présenté en compétition au Festival de Cannes dix jours avant sa sortie en salles, The Phoenician Scheme fait à nouveau regretter de n’avoir que deux yeux pour dévorer tant de beauté et d’invention mêlées.
Moins tarabiscotée, puisque linéaire, que les deux derniers opus cannois du cinéaste américain, The French Dispatch (2021) et Asteroid City (2023), cette comédie d’aventure, très ligne claire, a des airs de « Tintin au pays des capitalistes ». Situé en 1950 dans le Royaume indépendant de la Grande Phénicie, tout aussi imaginaire que le Zubrowka de The Grand Budapest Hotel (2014), le long métrage voit un riche homme d’affaires européen, Anatole « Zsa Zsa » Korda (Benicio Del Toro, comme un requin dans l’eau), courir après l’argent pour sauver un projet pharaonique et, accessoirement, sa peau.
Dans son périple, l’élégant businessman, costard, cigare et jet privé, embarque une fille qu’il connaît à peine : la sienne. Placée au couvent dès l’enfance et sur le point de prononcer ses vœux, Liesl (Mia Threapleton, le portrait de sa maman Kate Winslet) accepte l’emploi d’héritière à l’essai dans le but d’identifier le meurtrier de sa mère. Naturellement, ses soupçons se portent sur le paternel… D’une drôlerie coupante, leurs retrouvailles, une « simple » conversation autour d’une table, témoignent du génie de la mise en scène : le champ-contrechamp étonne et ravit à chaque plan, élevé au rang d’art ludique — élevé tout court, d’ailleurs, en témoigne la brusque contre-plongée qui révèle, posée au balcon du palais Renaissance, une flopée de fils que Zsa Zsa n’a guère le temps ou l’envie d’aimer.
Course à l’échalote
Flanqué d’un précepteur danois incollable sur les insectes (Michael Cera, une nouvelle recrue), le duo père-fille prend l’avion, le train, le bateau… bref, chemine vers des investisseurs variés, des terroristes courtois, un oncle terrible (« Il n’est pas humain, il est biblique ! ») et, bien sûr, la réconciliation attendue. Écrit à quatre mains avec le fidèle Roman Coppola, The Phoenician Scheme s’inspire, selon Anderson, de feu son beau-père et de divers magnats célèbres, tels le Grec Aristote Onassis ou l’Arménien Calouste Gulbenkian, dont Zsa Zsa hérite d’ailleurs du surnom : « Monsieur 5 % ». Inutile de s’y connaître en économie (ouf !) pour s’amuser de cette course à l’échalote dans laquelle le dandy pas manchot épingle un club d’Occidentaux puissants qui imposent leurs règles du jeu au reste du monde — voir ce pari à quitte ou double, sur un panier de basket, avec les manitous d’un consortium de Sacramento (Tom Hanks et Bryan Cranston) arborant les sweat-shirts de leurs universités respectives.
Si la mort plane toujours sur le petit théâtre andersonien, The Phoenician Scheme détonne par sa violence, où Korda ne cesse de réchapper à des crashs aériens (quand son assistant, au début, se fait littéralement couper en deux) et distribue des grenades explosives comme des bonbons. Plus inédit encore, le voilà qui monte au ciel, littéralement dans les nuages, pour affronter son Jugement… « Quand je prie, personne ne répond », lui confie Liesl au terme de ces tribulations sophistiquées, qui se distinguent par leur profondeur et livrent, mine de rien, une recette du bonheur. Quitter les ordres et renoncer aux ors. Manger des escargots. Voir ses enfants grandir. Boire du whisky. Taper le carton avec, à la radio, un Bach mention très bien, Jésus, que ma joie demeure. On signe où ?