Carla et moi
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“Carla et moi”, une comédie vintage savoureuse, aux airs d’“Harold et Maud”
Dans la communauté juive de New York, un quadra déprimé reprend le dessus auprès d’une fantasque septuagénaire. Woody Allen n’est pas loin…
Pour ceux qui douteraient de la vivacité du cinéma indépendant : il bouge encore, et même sacrément, à en juger par cette comédie vintage enthousiasmante. Inconnu chez nous, Nathan Silver a déjà tourné huit films, il était temps que sa folie douce traverse l’océan. Folie casher, précisons-le, car c’est au cœur de la communauté juive que se déroule la crise existentielle et mystique XXL de Benjamin Gottlieb (Jason Schwartzman), veuf quadragénaire au bout du rouleau – talmudique. Lui, qui officie comme chantre (chargé des chants religieux pendant l’office) dans une synagogue de l’État de New York, a perdu à la fois sa foi et sa voix, après la mort accidentelle de sa femme. Il végète chez ses deux mamans, qui cherchent à le recaser. Un soir de dérive alcoolisée et de tentation suicidaire, il tombe sur son ancienne prof de musique, Carla, flamboyante septuagénaire, qui va lui demander d’organiser sa « bat-mitsvah » (bar-mitsvah pour les filles). Au contact de Carla, Ben, peu à peu, retrouve un sens à la vie.
Difficile de ne pas penser à une variante de Harold et Maud, même si Ben n’est plus un perdreau de l’année, et si la rayonnante Carla (Carol Kane) n’a rien de la mamie du film de Hal Ashby. L’esprit du Lauréat, de Mike Nichols, et celui des films les plus anciens de Woody Allen ne sont pas loin, avec cette fantaisie tournée en pellicule, qui, dans la trame même de son image au grain épais, capture la nostalgie des comédies américaines des seventies. S’il joue avec les références, Nathan Silver trouve cependant un ton bien à lui pour raconter la romance entre deux solitaires un peu en marge. Lui, grand enfant mélancolique, cornaqué par un couple lesbien aussi aimant qu’oppressant, cherche désespérément sa place dans le monde. Elle, fantasque, irrévérencieuse, est prête à se réinventer sur le tard.
Hymne aux rencontres qui sauvent et au chaos qui réveille, Carla et moi nous délecte, avec ses dérapages tragi-comiques et son burlesque de situation. Il faut forcer des portes qui – comme le destin – grincent et résistent. La levée de fonds pour la restauration de la Torah de l’Holocauste commence par des blagues intestinales du rabbin ; les confrontations existentielles se pratiquent – involontairement – sous champignons hallucinogènes ; le dîner de shabbat vire au règlement de comptes hilarant et gênant… Trouver sa propre musique, et s’accorder à celle de l’autre passe par des chemins de traverse, ici explorés avec autant de tendresse que de peps.
Telerama