LES MUSICIENS

De Grégory Magne
Réalisation : Grégory Magne
Avec : Valérie Donzelli, Frédéric Pierrot, Mathieu Spinosi

Durée : 1h 42min
Genre : Comédie dramatique
Pays : FR



Synopsis
Astrid Thompson parvient enfin à réaliser le rêve de son père : réunir quatre Stradivarius pour un concert unique attendu par les mélomanes du monde entier. Mais Lise, George, Peter et Apolline, les quatre virtuoses recrutés pour l’occasion, sont incapables de jouer ensemble. Les crises d’égo se succèdent au rythme des répétitions. Sans solution, Astrid se résout à aller chercher le seul qui, à ses yeux, peut encore sauver l’événement : Charlie Beaumont, le compositeur de la partition.
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Les Musiciens”, élégante comédie humaine avec de savoureux points d’orgue

Est-il possible de réunir quatre stradivarius pour un concert d’exception ? Une belle partition sur la recherche d’harmonie au sein d’un groupe.

 

Conflits d’ego, anciennes collaborations qui ont dérapé : malgré tout, ils cherchent l’accord parfait.

En introduction, la caméra semble caresser les courbes d’un violon, puis plonger en son cœur, comme en quête d’une réponse : comment, de ce bois-là, peut naître le plus beau des sons ? Ce stradivarius séculaire, instrument d’exception, disparu puis retrouvé dans un état miraculeux, Astrid (Valérie Donzelli) le veut à tout prix. Elle est prête à se ruiner, au grand dam de son frère, car il est la pièce manquante du rêve que leur père, riche mécène, n’a pas pu réaliser avant de mourir : réunir quatre stradivarius pour un concert unique sur une partition inédite. Pour l’occasion, Astrid recrute quatre virtuoses, trois violonistes et une violoncelliste. Mais, dans ce château censé servir d’écrin à leurs répétitions, c’est la mésentente. Problèmes d’ego, différences de formation, souvenirs amers d’anciennes collaborations : le quatuor ne parvient pas à s’accorder. L’héroïne demande alors l’aide de Charlie Beaumont (Frédéric Pierrot), le compositeur de la partition. Lequel rechigne, lui-même, car il n’est plus très emballé par son propre concerto…

Le réalisateur Grégory Magne aime filmer la naissance des affinités électives, le mystère des alchimies professionnelles : dans son premier film, L’Air de rien (2012), un huissier s’attachait et se consacrait entièrement à une ancienne vedette de la chanson. Puis Les Parfums (2020) montrait comment, à force d’attention, un chauffeur découvrait le monde olfactif et fermé d’une créatrice de senteurs. Cette fois, le réalisateur part d’une passion partagée (la musique) pour tisser des liens délicats, invisibles mais presque charnels, entre des artistes aux trajectoires et aux sensibilités très diverses. De leurs singularités, justement, de leurs notes si personnelles qui voyagent d’un archet à l’autre, naîtra une œuvre commune. Comme le résume si bien le compositeur, pour apaiser leurs tensions : « C’est peut-être en jouant chacun un peu faux que l’on joue juste, ensemble. »

Frédéric Pierrot merveilleux en bougon perfectionniste

Ainsi, sur une partition classique, se déploie une élégante et savoureuse comédie humaine, avec ses contretemps, ses points d’orgue — comment, soudain, la violoncelliste « débloque » les répétitions grâce à une improvisation jazzy —, ses moments de détente impromptus et ses bascules burlesques, car il n’y a pas que les convictions qui vacillent et chutent dans cette histoire de cordes… Le charme s’installe aussi, crescendo, grâce à son carré d’interprètes, véritables musiciens et très bons comédiens, dont l’altière et douce Marie Vialle ou Daniel Garlitsky, qui campe un magnifique personnage de violoniste perdant peu à peu la vue. Face à eux, Valérie Donzelli est délicieusement débordée et Frédéric Pierrot joue à merveille le bougon, détaché mais perfectionniste, dont l’œil (et l’oreille) frise de plus en plus au contact de la divine formation. Dernier musicien à citer, et non des moindres : la composition au centre du film est l’œuvre de Grégoire Hetzel et elle est digne, en effet, de quatre stradivarius.

Telerama