RENOIR
Réservation : pour acheter votre place à l’avance, cliquez sur l’horaire de la séance
“Renoir”, de Chie Hayakawa : une chronique impressionniste et lumineuse de l’enfance
Esquissé par petites touches, le portrait tout en délicatesse, dans le Japon des années 1980, d’une enfant mélancolique et solitaire.
Un prix de la délicatesse créative aurait pu être imaginé, au dernier Festival de Cannes, pour saluer ce film japonais injustement ignoré par le jury. Tout en s’inscrivant dans le genre classique de la chronique d’une enfance, Renoir propose une forme audacieuse : une suite de scènes souvent assez courtes, assemblées librement, comme une mosaïque de reflets du passé ou une tapisserie faite de sensations… En revenant en 1987, l’année de ses 11 ans, la réalisatrice Chie Hayakawa invente une sorte de spiritisme cinématographique pour donner vie à son double, l’adorable petite Fuki, livrée à une solitude précoce.
Le mystère est bien présent dans la vie de cette élève de primaire, qui se laisse happer par une émission de télé dont l’invité est un magnétiseur, aime les tours de magie qu’on fait avec des cartes à jouer et s’essaie même à hypnotiser une voisine. Comme si Fuki tentait de maîtriser des forces invisibles qui la dépassent : la mort venue rôder autour de son père, gravement malade, l’amour que sa mère ne sait pas lui donner, la vie qui la confronte à la réalité des adultes, tout en la laissant sur la touche, parce qu’elle n’est qu’une enfant.
Observer le monde avant de pouvoir y jouer un rôle, c’est cette attitude contemplative que le film nous invite à partager à travers l’extraordinaire regard de la jeune actrice Yui Suzuki, qui parle si peu et nous raconte tant de choses avec ses yeux. Le bonheur de la filmer place ce long métrage, pudique maelström d’émotions, du côté du portrait, au sens pictural, comme le suggère le titre. Celui-ci désigne le peintre Auguste Renoir, auteur du tableau Portrait d’Irène Cahen d’Anvers (1880), qui fascinait Chie Hayakawa quand elle était petite et dont son père lui offrit une reproduction. Un souvenir auquel elle revient en reproduisant ce geste heureux, mémorable : nous faire don de l’image d’une toute jeune fille que la caméra a, tel le pinceau, mise en lumière avec toutes ses nuances, révélant son isolement et sa mélancolie comme sa force et sa grâce.
Telerama