ON FALLING
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“On Falling”, de Laura Carreira, le portrait sensible d’une femme précaire dans l’enfer du néolibéralisme
À Édimbourg, une jeune immigrée portugaise subit la solitude et les affres de son job de préparatrice de commandes pour une entreprise d’e-commerce. Un premier film subtil, dans la veine de Ken Loach.

Un entrepôt monumental et froid comme un sanctuaire, où sont stockés les produits d’une entreprise d’e-commerce. La face cachée du néolibéralisme. C’est là qu’Aurora, la trentaine, trime dix heures par jour comme « pickeuse », c’est-à-dire préparatrice de commandes : elle passe avec un chariot entre les rayonnages, s’arrête pour prendre un produit, le scanne, l’emporte et repart jusqu’au produit suivant. Travail répétitif, aliénant, éreintant. Travail chronométré, où l’on peut être rappelé à l’ordre si on n’assure pas la cadence. Travail précaire. Aurora, immigrée portugaise, a débarqué à Édimbourg, où elle vit dans un appartement avec d’autres locataires, qu’elle connaît à peine. Chacun a sa chambre. La petite cuisine est le seul espace commun, propice à de brefs échanges, parfois un peu plus.
C’est un monde clos, d’hiver et de nuit — il ne fait pas encore jour quand Aurora part au travail et en revient. Du Édimbourg historique, on ne voit quasiment rien, surtout pas ses quartiers médiévaux. Avec ce premier long métrage, Laura Carreira, 31 ans seulement, démontre déjà beaucoup de maîtrise dans la mise en scène. La jeune réalisatrice portugaise, installée au Royaume-Uni, brosse ici un portrait à la fois plein d’empathie et de retenue pour son héroïne. On Falling rappelle parfois Sorry We Missed You, de Ken Loach — les deux films partagent la même société de production, créée par le vétéran du cinéma anglais. À cela près qu’il s’agit, ici, d’une femme seule, sans famille autour d’elle. Déplacée. Isolée.
Peu à peu s’installe la sensation que cette travailleuse est au bord du précipice. Une tension diffuse plane, subtilement entretenue par des détails, des petits événements. Même si des occasions de rencontres, quelques lueurs d’espoir ou de divagation apparaissent, apportant des appels d’air. La précision sensible au moindre geste, l’attention au bruit comme au silence, l’alternance de mouvements obligés et de relâchement, tout cela concourt à l’attrait du film, finement interprété par Joana Santos, farouche, fragile et douce, sous son masque d’impassibilité.
Telerama

